Enjeux Économiques - Audit et Conseil en Afrique

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Audit et Conseil

En l’espace de quelques mois, le paysage de l’audit et du conseil en Afrique subsaharienne francophone est en train de basculer. Le 31 mars 2025, PwC a annoncé la séparation de ses cabinets en Côte d’Ivoire, Gabon, Cameroun, République du Congo, RDC, Madagascar, Guinée, Sénégal et Guinée équatoriale, qui ne font plus partie du réseau mondial.

Dans la foulée, EY a confirmé la fermeture de son « cluster » Afrique subsaharienne francophone d’ici à 2026, avec un retrait effectif annoncé autour d’avril 2026. Selon plusieurs analyses, ce désengagement ouvrirait un marché annuel supplémentaire estimé entre 500 millions et 1 milliard de dollars pour les services d’audit, de fiscalité, de transaction et de conseil dans la région.

Pour les cabinets locaux qui représentaient ces marques, le choc est double. À court terme, ils perdent la puissance d’un nom mondial, l’accès aux méthodologies globales, aux outils technologiques mutualisés et au flux de missions internationales. Ils doivent aussi gérer l’inquiétude légitime de certains clients régulés (banques, assurances, filiales de groupes cotés) attachés au label « Big Four ».

Mais cette rupture est aussi une formidable fenêtre d’opportunités. D’abord, elle permet la création de véritables marques africaines de l’audit. Dès la sortie de PwC, d’anciens associés ont soit rejoint d’autres réseaux mondiaux comme BDO (audit) ou repris leur ancienne dénomination sociale comme FIDAFRICA (Tax & Legal) au Congo, illustrant la capacité des équipes locales à capitaliser sur leur réputation propre.

Ensuite, elle pousse à l’agrégation régionale. Libérés des contraintes de gouvernance d’un réseau global, ces cabinets peuvent bâtir des plateformes intégrées couvrant plusieurs pays UEMOA ou CEMAC, mutualiser leurs fonctions techniques (IFRS, normes ISA, IT audit, ESG) et gagner une masse critique face aux acteurs restants. L’enjeu n’est plus seulement national : il s’agit de faire émerger de vrais « mid-tier » africains capables d’intervenir sur des groupes régionaux, des États et des bailleurs.

Ces nouveaux ensembles peuvent également proposer des modèles mieux adaptés aux réalités locales : honoraires calibrés pour les PME et les ETI, meilleure compréhension des environnements réglementaires (OHADA, régulations bancaires régionales) et accompagnement plus stratégique des États dans la mobilisation fiscale ou les PPP. Là où certains réseaux mondiaux se sont montrés très averses au risque, les acteurs africains disposent d’une marge de manœuvre plus large, à condition de rester irréprochables en matière de qualité et d’indépendance.

Un autre enjeu majeur réside dans la capacité des anciens experts des Big Four à transmettre leur savoir-faire aux nouvelles générations. Ces cabinets naissants doivent investir massivement dans la formation continue, la mise à jour des compétences techniques et la culture d’exigence qui faisait la force des grands réseaux internationaux. Sans cet effort de transmission, la qualité des travaux risque de s’éroder, au moment même où ces nouvelles marques cherchent à s’imposer.

Ils doivent également relever un enjeu technologique important : les Big Four développaient leurs propres logiciels d’audit, d’analyse de données et d’automatisation, offrant un avantage déterminant en matière de productivité et de qualité. Les nouveaux cabinets doivent donc investir dans des solutions alternatives ou nouer des partenariats technologiques pour rester compétitifs et maintenir des standards élevés.

Enfin, cette recomposition ne profite pas qu’aux cabinets locaux : elle laisse aussi de l’espace à d’autres réseaux internationaux (Big Four restants ou « mid-tier ») pour nouer des alliances ciblées. Mais la dynamique actuelle crée, pour la première fois depuis longtemps, une véritable possibilité de faire émerger des champions africains de l’audit et du conseil, plus proches des contextes, des langues, des administrations et des tissus économiques qu’ils accompagnent. À eux de transformer ce moment de rupture en projet structuré de souveraineté professionnelle.

 

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